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    [Ougarit] Géographie physique du royaume d'Ougarit

    Sith'ari
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    Message par Sith'ari Jeu 21 Aoû 2014 - 11:45

    Comprendre l'agriculture d'un pays, apprécier son importance, c'est d'abord connaître les conditions du milieu naturel dans lequel elle s'est développée. Les conditions naturelles en Syrie dénotent un caractère très varié, mais restent dans l'ensemble maniables, exception faite du désert syrien, et offrent un contexte relativement favorable à l'occupation humaine et à l'agriculture en particulier. Comme partout ailleurs dans le monde, tout dépend des ressources d'eau effectivement disponibles. Les solutions humaines à cette absolue nécessité varient selon le terrain et en fonction de l'ingéniosité et de la sagacité des humains pour acquérir, conserver, améliorer ces ressources naturelles indispensables pour la vie quotidienne aussi bien que pour le développement économique.

         La Syrie, soumise à un climat méditerranéen qui acquiert un caractère continental à mesure que l'on se dirige vers l'est et le sud-est, est divisée inégalement par l'isohyète des 250 mm qui sépare théoriquement les régions à agriculture sèche de celles à agriculture irriguée. Par conséquent, la disponibilité de l'eau dépend d'abord de l'espace. Ainsi l'eau devient une « commodité rare » à mesure que l'on s'enfonce dans l'est et le sud-est étant donné que le climat continental se caractérise par une plus grande sécheresse. Un autre facteur qui affecte la présence de l'eau est la température, étant donné que dans l'aire géographique levantine l'année se divise en deux saisons, l'une sèche et l'autre humide. En outre, la quantité de pluie qui tombe annuellement varie grandement d'une année à l'autre.

         Le site de Ras Shamra se situe sur la côte syrienne, aux pieds du jabal Ansariyé. Dans sa partie orientale, la frontière du royaume s'étendait de 40 à 60 km vers l'intérieur; au nord elle était marquée par jabal el-'Aqra, alors qu'au sud elle se situait dans les environs de Tell Sukas. Le littoral syrien, autant dans le passé que présentement, a toujours bénéficié d'un climat typiquement méditerranéen caractérisé par la douceur des températures, une saison sèche estivale (mai à août) et des précipitations limitées principalement à la saison hivernale (septembre à mars). La proximité immédiate de la mer et le barrage montagneux qui limite la plaine côtière à l'est contribuent au caractère tempéré de ce climat favorable à la végétation. Par ailleurs, malgré le nombre restreint de jours de précipitations (84,2 jours/an),  la côte est généralement bien arrosée et reçoit en moyenne plus de 800mm/an. À cette source importante d'apport hydrique s'ajoute le régime hydrographique qui alimente Ras Shamra et sa région.

         Les conditions hydrogéologiques: les cours d'eau et les nappes phréatiques

         Les cours d'eau et les nappes phréatiques constituent un apport supplémentaire d'eau nécessaire non seulement pour les cultures en été mais aussi pour la provision d'eau potable à toute agglomération. Deux ruisseaux sillonnent la proximité immédiate du tell: le nahr Chbayyeb au nord, qui s'étale sur environ 11km, et le nahr ad-Delbé au sud, long de 8,7 km. Ils prennent naissance sur les pentes du plateau de Bahlouliyé, situé à l'est, à quelques kilomètres de Ras Shamra. Avant de se jeter dans la baie de Minet el-Beida, ils se rejoignent pour un court moment pour former le nahr al-Faydh (ou nahr el-Fidd) long de 0,5 km. Dû à leur taille modeste, le flot de ces ruisseaux ne draine qu'une région limitée dont l'étendue actuelle est de 25 km2 environ. En outre, leur régime d'eau dépend directement des saisons; ils coulent durant l'hiver mais accusent une baisse durant le printemps, période pendant laquelle leurs étiages sont soutenus grâce aux dernières pluies et à la nappe superficielle. Ils se dessèchent en été pour ne prendre vie qu'avec les premières pluies automnales. Bien qu'une exploitation humaine sur plusieurs millénaires ait abouti au tarissement actuel des ressources hydriques, il ne devrait pas y avoir une très grande différence entre le passé et le présent. Ces différences relèvent surtout des conditions édaphiques où le couvert végétal naturel et le sol accusaient une dégradation certainement moins avancée, ce qui permettait de maintenir une plus grande humidité, qui à son tour limitait la période de tarissement des ruisseaux. La saison sèche était déjà une réalité mais ses effets étaient relativement moins contraignants.

         Ces ruisseaux ne pouvaient donc, à eux seuls, ni suffire aux besoins de l'agriculture, ni maintenir les réserves d'eau douce pour la consommation humaine. À cet effet, les nappes phréatiques représentaient une source d'apport supplémentaire moins affectée par les saisons; mais encore fallait-il pouvoir y accéder. C'est uniquement la nappe superficielle, contenue dans les formations marines ou littorales quaternaires et les calcaires de l'Éocène moyen, qui était exploitée parce qu'elle ne nécessitait pas de forage. Moins sollicitée que présentement, cette nappe pouvait assurer l'alimentation des sources pérennes. Dans l'état actuel, dans la proximité immédiate de Ras Shamra, des trois sources qui coulaient d'une manière permanente il n'y a qu'une cinquantaine d'années, deux sont taries durant l'été alors que la troisième, située à l'ouest du tell a complètement disparu. Bien que la surexploitation et l'assèchement précoce des cours d'eau n'étaient pas des problèmes courants pour les habitants d'Ougarit, les conditions hydrogéologiques étaient loin d'être idéales. L'eau, durant l'été restait une « commodité rare ».

         Les aménagements hydrauliques

         Malgré une dégradation végétale nettement moins avancée et des conditions édaphiques meilleures, l'eau constituait déjà un problème au deuxième millénaire; son débit estival insuffisant pour la consommation locale a poussé les ougaritains à faire quelques aménagements hydrauliques dont le barrage de Ras Shamra. Tout aménagement, pour qu'il soit efficace, doit tenir compte des données physiques sur le terrain. Les deux ruisseaux dans la proximité immédiate du site, nahr Chbayyeb au nord et nahr ad-Delbé au sud, accusent un écoulement de caractère saisonnier. Leur débit se transforme en véritable torrent dans leur partie amont durant la saison humide ou aux périodes de gros orages estivaux, ce qui rend impossible toute tentative d'érection de barrage. Par ailleurs, une fois dans la plaine, sur leur cours aval, les conditions physiques ne permettent pas la construction d'ouvrages importants. Par conséquent, les ougaritains ont jugé utile de pratiquer des aménagements sur les parties où les cours d'eau sont proches du site.

         Le barrage de Ras Shamra, construit sur nahr ad-Delbé, est décrit en détail par Calvet. Nous nous contenterons ici d'une description sommaire de ses principales caractéristiques:

    Un massif de blocs taillés est ancré sur la rive gauche du nahr ed-Delbé...Un seuil bas, en pierres taillées également, tapisse le fond du lit du cours d'eau. Un second massif, symétrique au premier, devait se trouver sur la rive droite...La forme du massif de la rive gauche est trapézoïdale. Un plan oblique oriente le flot vers le chenal central...Les blocs taillés sont apparemment élevés à joints vifs. Deux qualités leur permettaient de résister au courant: leur propre poids et le fait qu'il ont été reliés horizontalement par des tenons en queue d'aronde. Ces tenons...étaient vraisemblablement en bois et ont disparu...Pour arrêter l'eau il fallait compléter ce dispositif par un véritable barrage, constitué de madriers de bois. L'angle obtus formé par le plan coupé et la paroi du chenal porte une saignée verticale qui a sans doute servi à caler ces madriers, empilés sur une hauteur égale à celle des blocs de pierre...En aval, deux autres saignées verticales, relativement minces, ont probablement servi à insérer des planches superposées, entre lesquelles un remplissage venait assurer un surcroît d'étanchéité.

         Plusieurs hypothèses existent quant à la fonction principale du barrage de Ras Shamra. Selon une première hypothèse, compte tenu de l'encaissement du cours d'eau à cet endroit, la faible retenue et le caractère saisonnier de l'écoulement, il ne s'agit pas d'un barrage destiné à l'irrigation par canaux ni à la génération d'une force motrice. Il sert de réserve directe pour subvenir à la consommation domestique des habitants et, à la rigueur, pour l'irrigation par arrosage, sans canaux. Selon une deuxième hypothèse, le barrage régularisait le flot du ruisseau soumis à un régime pluvial variable, évitant ainsi toute probabilité d'inondation de la plaine sous le tell. D'après une troisième proposition, le barrage contribuait à maintenir le niveau de la nappe phréatique, qui alimente Ras Shamra, à une hauteur raisonnable. La ville d'Ougarit dépendait des puits environnants pour subvenir aux besoins domestiques de ses habitants. Il fallait donc éviter le tarissement de la nappe phréatique et assurer son accessibilité en permanence, surtout en été. À l'aide de la retenue du barrage de nahr ad-Delbé et de celle de nahr Chbayyeb, qui était probablement barré de la même façon, la nappe située sous le tell, à un niveau légèrement inférieur aux deux barrages, pouvait être alimentée d'une manière permanente.

         La fonction secondaire du barrage consistait à servir de support de pont, permettant de traverser le nahr ad-Delbé d'une rive à l'autre, d'autant plus qu'il était construit pour faire face à ce qui était probablement l'entrée sud de la ville. « Dans cette perspective, les piles devaient supporter le tablier en bois d'un pont, le chenal à franchir ne devant guère excéder deux mètres de large ». À cet effet il est important de signaler la présence d'un barrage-pont contemporain aménagé sur nahr Chbayyeb. Il servait à créer des retenues où il est plus facile d'établir des pompages. Bien que cet ouvrage soit aujourd'hui abandonné, il reflète l'efficacité du système qui, malgré le temps, reste toujours une solution adéquate bien adaptée au terrain.

         L'aménagement de tout type de barrage est dicté par le genre des ressources naturelles et les besoins de la population locale. Par son caractère amovible, le barrage de Ras Shamra était bien adapté au régime d'eau qu'il retenait. En effet, la crue du nahr ad-Delbé peut être torrentielle et il vaut mieux dans ce cas la laisser passer afin d'éviter d'éventuelles inondations. En revanche, avant et pendant l'étiage la conservation de son flot assurait une utilisation directe comme réservoir d'eau douce ainsi qu'une utilisation indirecte, à savoir l'alimentation de la nappe superficielle. Contrairement à sa partie centrale, les piles des deux côtés étaient permanentes et servaient à supporter un pont. Une telle construction s'adaptait bien aussi à la topographie de la région, dans un pays où la pierre ne manque pas et où les montagnes alors boisées fournissaient les poutres nécessaires.

         La maîtrise de l'eau reste un des problèmes principaux de la Syrie même de nos jours où l'on « assiste à une âpre concurrence entre les besoins en eau d'irrigation et la consommation urbaine et industrielle ». Bien que les conditions se soient détériorées depuis le deuxième millénaire av. l'è. c., la question de l'eau a toujours représenté un sujet problématique dans la région.

         L'objectif principal de cette discussion portant sur les conditions hydrogéologiques et les aménagements hydrauliques consistait à démontrer l'importance primordiale de la pluie pour l'agriculture locale; les sources pérennes, les cours d'eau, les barrages ne constituaient qu'une source d'apport secondaire qui n'arrivait pas à assurer la quantité d'eau nécessaire et compenser au manque de pluie durant la saison estivale.

         Pour clore cette section sur la géographie physique d'Ougarit nous en rappelons les grandes lignes. La Syrie connaît un climat tempéré dont la continentalité et l'aridité se renforcent à mesure que l'on s'enfonce à l'intérieur du pays. Trois zones pluviométriques se distinguent sur le territoire syrien. La région du littoral et du nord-ouest est bien arrosée et reçoit en moyenne plus de 800mm de pluies par an. La zone steppique intérieure en forme de croissant constitue en fait une région de transition entre le littoral et le désert, et reçoit entre 250-500mm de pluies. Finalement, le désert qui occupe tout le sud-est accuse un taux de précipitations inférieur à 250mm. L'année est divisée en deux parties, une saison sèche estivale et une saison humide hivernale, avec une régularité inter-annuelle largement variée. Dans le présent et plus encore dans le passé, l'agriculture sur le littoral syrien a toujours dépendu en premier lieu des précipitations comme source d'irrigation. Les ressources hydrographiques et les aménagements hydrauliques constituaient des sources d'apport d'eau secondaires dont le rôle principal consistait à subvenir aux besoins domestiques des habitants de la ville. Au moins jusqu'à présent, les fouilles archéologiques n'ont pas révélé de traces d'irrigation par canaux. De plus, les ruisseaux dans la proximité immédiate du site, avec leur caractère saisonnier, se prêtent mal à de pareils aménagements. Malgré des conditions édaphiques et végétales meilleures, la saison sèche était déjà une réalité dans l'antiquité et l'angoisse qu'elle causait n'était vraiment soulagée que par les premières précipitations.

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