Dans le Cratyle, son dialogue sur le langage, Platon nous livre une interprétation de la signification du nom des dieux. Je vous joins ici le passage en question pour chaque dieu.
Il y a encore ensuite de nombreuses interprétations des significations de nom de choses divines, tel le soleil, la lune, les saisons, etc, mais je vous renvoie au dialogue lui même pour cela : http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/cratyle.htm
- Zeus:
- Quant au nom de Ζεύς, Jupiter, qui, dit-on, fut son père, je le trouve parfaitement convenable; mais c'est ce qui n'est pas facile à concevoir. Véritablement ce nom équivaut à tout un discours, et il a été divisé en deux parties, dont on emploie tantôt l'une, tantôt l'autre, les uns l'appelant Ζῆνα, les autres Δία ; réunis, ces deux noms expriment la nature du Dieu : et telle est, comme nous l'avons dit, la fonction que les noms doivent remplir. En effet, la vraie cause de la vie, τοῦ ζῇν, pour nous et pour tout ce qui existe, est le maître et le roi de toutes choses. Il est donc très juste d'appeler ce Dieu celui par lequel, δι' ὅν, il est donné à chacun de vivre, ζῇν ; mais ce nom, qui est un, a été divisé en deux, ainsi que je l'ai dit.
- Cronos:
- Maintenant, de dire que ce dieu est fils de Cronos (Saturne), il semble au premier abord que ce. soit une impertinence : mais il est naturel que Jupiter soit le fils d'une intelligence supérieure; et en effet, le nom de Cronos est un composé de deux parties, dont la première, κόρος, signifie, non pas le fils, mais bien ce qu'il y a de plus pur dans l'intelligence, νόος.
- Ouranos:
- Cronos, à son tour, est, dit-on, fils d'Uranos (le ciel) : on a très bien appelé Uranie, Οὐρανία, ὁρῶσα τὰ ἄνω, la contemplation des choses d en haut d'où vient l'intelligence pure, s'il en faut croire les hommes qui s'occupent des choses célestes, et qui trouvent que le ciel a été bien nommé Uranos.
- Hestia:
- Et si l'on étudiait les noms étrangers à ce pays-ci, on trouverait également à chacun une signification. Par exemple, pour celui dont nous parlons, remarquons que ce que nous appelons οὐσία, l'essence, s'appelle en d'autres contrées έσία, et ailleurs encore ὠσία. D'abord on peut admettre que du second de ces trois mots on a tiré le nom de l'essence des choses, Ἐστία. Et si nous appelons Ἐστία ce qui participe de l'être, οὐσία, il s'ensuit encore que Hestia a été bien nommée; car nous aussi, à ce qu'il paraît, nous avons dit primitivement ἐσία pour οὐσία. En outre, si on fait attention aux cérémonies des sacrifices, on pourra se convaincre que telle était la pensée de ceux qui ont institué le nom d'Hestia. En effet, il était naturel que Hestia fut invoquée avant tous les dieux dans les sacrifices, par ceux qui avaient ainsi appelé l'essence de toutes choses. Quant à ceux qui lui ont donné le nom d'ὠσία, ils auront peut-être pensé, avec Heraclite, que tout passe et que rien n'est stable; et le principe d'impulsion, τὸ ὠθοῦν, étant la cause de ce flux perpétuel, ils ont dû trouver juste de le nommer ὠσία.
- Poséidon:
- Le nom de Poséidon vint, si je ne trompe, de cette circonstance : celui qui l'établit se trouva un jour arrêté dans sa marche par la mer, qui ne lui permit pas d'aller plus loin, et qui fut comme une entrave, δεσμός, pour ses pieds, ποσί. De là il appela le dieu qui commandait à cette puissance Poséidon, de ποσίδεσμος obstacle pour les pieds. Probablement la lettre ε aura été ajoutée à l'ι pour l'élégance. Peut-être, du reste, n'est-ce pas cela, et y avait-il autrefois au lieu d'un σ deux λλ, ce qui faisait : le dieu qui sait beaucoup de choses, πολλὰ εἰδώς. Peut-être encore de l'action d'ébranler la terre, l'aura-t-on appelé celui qui ébranle, ὁ σείων ; et l'on aura ajouté ensuite le π et le δ.
- Hadès:
- Le nom de Pluton signifie qui donne la richesse, πλοῦτος, parce que la richesse provient des entrailles de la terre. Quant au nom d'Haidès, je crois que la plupart des hommes l'entendent dans le sens d'invisible, το ἀειδές, et que c'est pour éviter cette dénomination sinistre qu'ils préfèrent celle de Pluton.
(...)
Il me semble que les hommes se trompent de plusieurs façons sur le véritable pouvoir de ce dieu, et qu'ils en ont toujours témoigné une terreur bien mal fondée. Le motif de cet effroi, c'est qu'une fois parti pour le pays des morts, nul n'en revient; c'est aussi que l'âme se rend dépouillée du corps auprès de ce dieu. Quant à moi, je trouve une conformité parfaite entre son pouvoir et son nom.
(...)
D'après tout cela, disons (...) que nul d'entre les morts n'a la volonté de revenir de l'empire de Pluton, non pas même les Sirènes, mais qu'elles sont sous le charme comme tous les autres; tant est grande la beauté des discours que Haidès sait leur tenir; en sorte que ce dieu doit être un sophiste accompli, et en même temps un grand bienfaiteur pour ceux qui demeurent auprès de lui, puisqu'il envoie encore à ceux de ce monde de si riches trésors. Il faut bien qu'il possède là-bas des richesses immenses, et c'est ce qui l'a fait nommer Pluton. En outre, refuser la compagnie des hommes tant qu'ils ont leurs enveloppes matérielles, et entrer en commerce avec eux dès que leur âme est affranchie de tous les maux et de tous les désirs du corps, n'est-ce pas là, à ton avis, être philosophe, et avoir bien su comprendre que le meilleur moyen de retenir les mortels est de les enchaîner par le désir de la vertu; mais que tant qu'ils sont sujets à l'obsession et aux folies du corps, il n'y a pas moyen de les fixer auprès dé soi, quand même le père de ce dieu, Cronos, y emploierait ces fameux liens qui ont gardé son nom.
(...)
Il s'en faut donc beaucoup (...) que ce nom de Haidès soit tiré du mot ténébreux, ἀειδής; c'est plutôt la propriété de connaître, εἰδέναι, tout ce qui est beau, qui lui fait donner ce nom par le législateur.
- Déméter:
- Le nom de Dèmèter vient, je pense, des aliments qu'elle nous procure et qu'elle donne comme une mère, διδοῦσα ὡς μήτηρ.
- Hera:
- Hèra revient à aimable, ἐρατή; on dit en effet qu'elle est aimée de Jupiter. Peut-être aussi le législateur tout occupé des choses du ciel, a-t-il voulu cacher sous ce nom celui de l'air, ἀήρ, en mettant à là fin la lettre du commencement, ce qu'il est facile de reconnaître en prononçant de suite plusieurs fois le nom à Héra.
- Apollon:
- Donc, le dieu purificateur sera à la fois celui qui lave ἀπολούων, et qui délivre, ἀπολύων, des maux du corps et des maux de l'âme.
(...)
Ainsi, à cause de la délivrance et de la purification de tous ces maux qu'il opère en qualité de médecin, on peut l'appeler convenablement Apolouôn. A l'égard de la divination, l'art de trouver le vrai et le simple, ἀπλοῦν (car c'est là même chose), le nom qu'on lui donne en Thessalie lui conviendrait fort bien ? tous les Thessaliens appellent ce dieu Haplôn. En troisième lieu, considéré comme archer toujours sûr de ses coups, il est, dans l'art de lancer des flèches, le dieu qui atteint toujours au but, ἀεὶ βάλλων. Enfin relativement à l'art musical, il faut remarquer que comme l'α, dans certains mots, tels que ἀκόλουθος, suivant, et ἄκοιτις, épouse, signifie ensemble le nom dont il s'agit exprime l'ensemble, la concordance d'une révolution du ciel πόλησις, autour de l'axe des pôles, πόλων, avec l'harmonie dans le chant que l'on appelle symphonie; car au dire des gens habiles dans la musique et dans l'astronomie, la révolution du monde forme une harmonie. Or le dieu dont nous parlons préside à l'harmonie, dirigeant à la fois ce double mouvement, ὁμοπολῶν, chez les dieux et chez les mortels. De même donc que ὁμοκέλευθος et ὁμόκοιτις ont produit ἀκόλουθος et ἄκοιτις, en changeant l'o en α, de même Apollon s'est formé de Homopolôn, en ajoutant une l, pour éviter l'équivoque avec un mot dont le sens est fâcheux. C'est ce même mot, que faute d'avoir bien compris la force du nom d'Apollon, certaines gens redoutent encore aujourd'hui comme s'il annonçait quelque fléau. Le véritable nom, au contraire, s'applique parfaitement, ainsi que nous 65 venons de le faire voir, à toutes les attributions du dieu, à la science du vrai et du simple, à l'art de lancer des flèches toujours sûres, à l'art de purifier, à l'art de conduire en même temps Je mouvement du ciel et les concerts.
- les Muses:
- Le nom des Muses et en général celui de la musique, paraῖt avoir été tiré de μῶσβαι, chercher, et de l'amour des recherches et de la philosophie. Lêtô a été ainsi nommée à cause de sa douceur, comme une divinité disposée à vouloir tout ce qu'on lui demande; Ou peut-être faut-il prononcer ce nom comme le font les étrangers: un grand nombre disent Léthô. Ce nom viendrait alors du caractère exempt de rigueur, doux et uni de cette déesse, λεῖον ἦθος.
- Artémis:
- Artémis paraît signifier, l'intégrité, τὸ ἐτεμές, la pureté, et se rapporter à son amour pour la virginité. Peut-être l'inventeur du nom a-t-il voulu dire qu'elle connaît la vertu, ἀρετῆς ἵστωρ; peut-être encore a-t-il voulu exprimer la haine pour le commerce de la femme avec l'homme, ἄροτον μισήμασα; il se sera déterminé sans doute par quelqu'une de ces raisons ou bien, par toutes à la fois.
- Dionysos:
- Dionysos sera donc celui qui nous donne le vin, διδοὺς τὸν οἶνον, et ou l'aura nommé en plaisantant Didoinysos. Le vin lui-même ὁ, οἶνος, qui fait que la plupart des buveurs se figurent, οἴονται, avoir l'intelligence, νοῦν, qu'ils n'ont pas, a fort bien pu être appelé οἰόνους.
- Aphrodite:
- Pour ce qui regarde Aphrodite, ce n'est pas la peine de contredire Hésiode. Nous ferons mieux de convenir avec lui qu'elle doit son nom à l'écume, ἀφρός, de la mer d'où elle naquit.
- Athéna:
- Je crois que les anciens ont eu sur Athéné la même idée que ceux qui se piquent aujourd'hui de bien entendre Homère. La plupart d'entre eux disent que leur auteur a fait de cette divinité la pensée et l'intelligence même; et celui qui a fait les noms paraît être entré dans le même sens, et plus avant encore, en l'appelant pensée de Dieu, νόησις Θεοῦ, comme qui dirait la Théonoé, ἁ Θεονόα, en ajoutant un ά au lieu de ἡ (la), suivant un dialecte étranger, et en retranchant le ε et l'ι de. νόησις. Peut-être aussi ne l'a-t-ii appelée Théïnoé que parce qu'elle possède excellemment la connaissance des choses divines, θεῖα νοούση. Il n'est pas impossible non plus qu'on lait voulu appeler Êthonoé, comme étant la raison, l'intelligence dans les mœurs, νοήσις ἐν τῷ ἤθει. Ainsi l'inventeur de ce mot ou ceux qui l'ont suivi, en faisant quelques changement pour la grâce de la prononciation, en seront venus à dire Athéné.
- Héphaïstos:
- Tu veux mon opinion sur ce grand maître dans la connaissance de la lumière, φάεος ἵστωρ?
(...)
Tout le monde y reconnaîtra un dieu lumineux, φαῖστος, avec un η en avant du mot
(...)
- Arès:
- Si tu veux, Arès viendra de ἀρρέν, mâle, ἀνδρεῖον, viril. Ou, si tu aimes mieux : considérer son caractère âpre et inflexible, ἄρρατον, le nom d'Arès se trouvera très convenable pour un dieu si guerrier.
- Hermès:
- Sûrement ce nom doit avoir trait à la parole et au discours ; car les divers attributs d'Hermès, interprète, ἑρμηνεύς, messager, rasé voleur, séduisant discoureur, protecteur des marchés publics, tout cela se rapporte à la puissance de la parole. Or, comme nous l'avons déjà observé précédemment, le mot εἰρειν désigne l'exercice . de la parole. De plus, le mot ἐμήσατο, qu'emploie souvent Homère, signifie inventer. Ainsi, en considération de ces deux choses, la parole et l'invention de la parole, et attendu que εἴρειν, c'est parler, le législateur semble nous dire au sujet de ce dieu : « Celui qui a inventé la parole, τὸ εἴρειν ἐμήσατο, il serait juste, ô hommes, qu'il fût appelé par vous Eirémès. » Mais nous croyant sans doute donner à ce mot un tour plus élégant, nous disons Hermès. c'est aussi à ce mot εἴρειν, qu'Iris semble devoir son nom, en sa qualité de messagère.
- Pan:
- Ainsi la partie de la vérité en doit être légère, divine placée là~haut avec les immortels, et celle du mensonge doit résider avec le vulgaire des hommes d'une nature brutale et analogue à celle du bouc; car c'est dans, cette vie de bouc que prennent naissance la plupart des fables et des mensonges.
(...)
Il est donc raisonnable que la puissance qui énonce toutes choses ; et qui est toujours en circulation dans le monde, ἀεὶ πολῶν, soit appelée Pan Aipolos, πὰν αἰπόλος, le fils d'Hermès à deux natures, gracieux et beau dans les parties supérieures; velu et semblable à un bouc dans les inférieures. Ainsi, comme fils d'Hermès, Pan est ou le langage même, ou le frère du langage : et qu'y a-t-il d'étonnant à ce que le frère ressemble au frère?
Il y a encore ensuite de nombreuses interprétations des significations de nom de choses divines, tel le soleil, la lune, les saisons, etc, mais je vous renvoie au dialogue lui même pour cela : http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/cratyle.htm